Après la bataille, le journal de marche mentionne à la date du 22 mai :
« les 1ère et 2e compagnies qui occupaient les tranchées de la Maison Blanche se rendent à Vignot »
Sans doute emportent-elles avec elles les corps des camarades morts pendant les combats. La fiche matricule de Léon mentionne en tout cas : « inhumé à Vignot (Meuse) ». Cette localité, au pied du bois d’Ailly , cantonnement apprécié des poilus, a fait l’objet d’un article précédent (Cantonnement à Vignot).
Si l’on en croit un article hagiographique paru dans la presse du Doubs, sur lequel j’aurai l’occasion de revenir, Léon était apprécié de ses hommes, pour lesquels il était « une force morale » ; on peut donc penser que son enterrement a été l’occasion d’une scène comme celle décrite dans ce poème, intitulé :
Le Copain
On t’a porté la nuit, par la marne pouilleuse.
Tes bonshommes pleuraient. Leurs rudes mains pieuses,
Timides, t’effleuraient, comme un petit qui dort ;
Leurs genoux cadencés ballotaient ton front mort,
Et ton sang clair coulait le long de nos chaussures.
Ta capote n’avait qu’une croix pour parure,
Les étoiles du ciel regardaient par les trous !…
Mais nous sommes tombés pour prier, à genoux,
Quand j’eus pris sur ton cœur les lettres de ta mère,
Et qu’on vous eut mis toi, puis ta jeunesse, en terre.
Et fermant pour toujours les clartés de tes yeux,
J’ai simplement, comme auraient fait les pauvres vieux,
Mon héros de vingt ans, baisé ta chair de marbre !
Et j’ai laissé ton âme à l’âme des grands arbres !…
(Paul Verlet)