Né quelque part

Source bleue - copie

 

Léon MÜHR était originaire d’un très joli coin du Doubs : la vallée du Cusancin.

Les sources y sont des résurgences et portent des noms de couleurs : la Cuse sort de la Source Noire, au pied d’un rocher blanc de calcaire, l’Anse surgit dans un bassin d’une profondeur turquoise qui lui vaut le nom de Source Bleue. Les deux se rejoignent pour former le Cusancin dont les eaux pures se jettent dans le Doubs à Baume-les-Dames.

Louis Pergaud décrivait la vallée ainsi :

A 1 km de là, ‘le Val’ est situé dans une vallée fort jolie d’ailleurs, bien que très encaissée. C’est un petit pays tout en longueur dont les maisons proprettes longent une rivière au flot limpide et frais que hante une truite très rare et fort renommée. Quelques prairies en pente arrivent comme des torchons de verdure à la rivière, tandis que plus haut la côte avec ses forêts et ses rochers s’élève raide et escarpée barrant l’horizon» .

aimableLe grand-père de Léon, né à Landresse, à quelque distance de là, était arrivé à Cusance jeune instituteur et y avait épousé une jeune fille du pays, Julie COUR. Les deux époux avaient en commun d’avoir perdu en très bas âge leurs frères respectifs et chacun d’eux hérita donc de tout le bien de ses parents. Cela leur assura une certaine aisance.

outilsAimable PAHiN-MOUROT quitta son métier pour se consacrer à l’exploitation de sa terre. Le couple eut sept enfants dont cinq survécurent : quatre filles et un seul fils. Veuf de bonne heure, le patriarche vivait dans sa grande maison entouré de sa famille avec le projet de transmettre à son fils Ernest le domaine qu’il avait reçu et agrandi. Il ne souhaitait donc pas marier ses filles et faisait âprement (il n’avait d’aimable que son nom) la chasse aux galants qui s’approchaient de trop près… même pour la bonne cause. Mise à part Marthe, la plus jeune qui entra au couvent, les trois autres qui n’avaient pas de telle vocation avaient de bonnes chances de rester « vieilles filles ». Ce fut d’ailleurs le cas longtemps de Joséphine, l’aînée, qui ne fut autorisée qu’à trente cinq ans à épouser Louis HIENNE, qu’elle fréquenta pendant des années en cachette de son père. Le couple n’eut pas d’enfant. Hortense mon aïeule eut plus de chance; son père ne refusa pas sa main au gendarme François PEQUIGNOT qui voulut bien la prendre sans dot. Ils eurent un fils et trois filles, la deuxième étant ma grand-mère Adèle.

Il ne refusa pas non plus, quelques années plus tard le mariage de Félicie avec Louis MÜHR. Né à Guillon, de parents originaires d’Alsace, celui-ci exerçait avec son frère la profession de taillandier. Ils commercialisaient sur les foires des objets de coutellerie qu’ils fabriquaient et diffusaient sous leur marque. De ce mariage assez tardif naquit, à Guillon (un peu en aval de Cusance) un fils –unique- Léon le 1er mars 1890. Leon adolescent_0001

 

Léon était destiné à reprendre les affaires de son père et de son oncle qu’il aidait depuis son plus jeune âge. Mais son destin ne dépendait pas de lui : le 2 aôut 1914, après avoir entendu le tocsin au clocher de l’église et lu l’ordre de mobilisation générale affiché à la mairie, il reprit le chemin du Fort de Belfort où il avait effectué son service militaire, pour se mettre à la disposition de son pays. Certainement pas joyeusement, mais résolument.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>